Chroniques littérairesContemporain

Le livre que je ne voulais pas écrire d’Erwan Larher

Le livre que je ne voulais pas écrire d'Erwan Larher

Un roman époustouflant et bouleversant ! Un objet littéraire hors du commun. Des émotions à fleur de peau. A la fois glaçant et poignant, il constitue une étape dans la vie du romancier, du lecteur et communique une charge émotionnelle puissante. Retour sur cette lecture marquante.
Ce que raconte Erwan
Erwan Larher est romancier. Comme beaucoup d’autres, il s’est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Un soir il se rend au Bataclan pour assister au concert des Eagles of death metal.

Ce soir, c’est celui qui prendra la vie à plus d’une centaine de personnes.

Ce soir, c’est celui que l’on n’oubliera jamais.

Ce soir, c’est celui du 13 novembre 2015.

Sa passion pour le rock l’a conduit à vivre cette mésaventure, marquant à la fois l’homme qu’il est mais aussi l’écrivain. En pleine écriture d’un roman Marguerite n’aime pas ses fesses, Erwan Larher réfléchit à ce « Projet B », à ce « livre qu’il ne voulait pas écrire », où la voix de l’homme et du romancier s’entremêlent.
Une opposition à la machine médiatique
Le livre que je ne voulais pas écrire, ce titre significatif fait vibrer rien qu’au simple regard se posant sur la couverture de ce roman. Erwan Larher se sent comme piégé par cette tuile vécue et ne souhaite en aucun livrer un témoignage, un livre reportage sur la tuerie du Bataclan. Les chaînes de télévision, fonctionnant comme un cerveau traumatisé, ont déjà suffisamment fait de dégâts. Voyeurisme, reconstitution, diffusion d’images et de témoignages de rescapés plongés dans le désarroi, suscitant des « c’est horrible » en réponse aux images… Une réaction restreinte à deux  mots avec aucune réflexion.

Erwan Larher est romancier et inscrit son œuvre en opposition avec la machine médiatique. Il décide d’écrire un véritable objet littéraire, une œuvre poignante. Où le lecteur vibre du début à la fin. Et le conduit à porter une réflexion plus large et approfondie sur le monde, l’humain, la société.

Le romancier ne se contente pas de revenir uniquement sur la tuerie du Bataclan. Bien qu’elle constitue l’intrigue du roman. Erwan Larher parle de lui et de ses proches, questionne le monde et l’humain à travers ces actes de violence inqualifiables. Il n’omet pas d’ironiser, jouant avec nos émotions grâce au rythme très bien mené instauré dès les premières pages.

Le roman est si bien construit que l’auteur aurait pu nous tenir en haleine avec n’importe quel autre sujet.

Tout l’art de l’écrivain réside dans son style littéraire et l’objet qui en découle.

Erwan Larher traite les attentats du 13 novembre avec une réflexion sur l’humain, la manière dont il l’a vécu et la position dans laquelle il se situait ensuite vis-à-vis des autres, de son entourage. Il axe la moitié du roman sur ses proches et moins proches, qui ce soir là, étaient soit en voyage au Vietnam, en Province chez leurs parents, au lit achevé par l’alcool, chez eux sur Facebook à s’échanger des informations, à s’inquiéter pour lui, etc.

D’ailleurs, l’auteur souligne le rôle immense et l’ampleur de Facebook lors d’un évènement comme celui-ci.

L’écrivain pointe aussi du doigt la violence vue à travers la fiction. Absence de sang, hommes qui se relèvent avec deux balles dans le corps… Dire « il va bien, seule une balle a traversé sa jambe », voir sa vie défilé avant de mourir, ceci n’est pas la réalité !

Authentique, Erwan Larher dévoile ce qu’est la violence, la peur et le traumatisme, à travers le corps et l’esprit.

Je conseille cette lecture épatante. Au delà du sombre sujet traité, ce roman est une rencontre avec un écrivain exceptionnel.

Point de pathos, point de voyeurisme, une fois refermé, Le livre que je ne voulais pas écrire devient Le livre que je ne pouvais pas oublier. Un vrai coup de cœur pour ce roman à sensation grâce au pouvoir des mots et de la littérature qu’Erwan Larher manie et exploite à sa manière, avec son style singulier et son rythme accrocheur. Un auteur à suivre et une bibliographie à explorer sans attendre !
Extrait
 » Voilà quelques années que tu as décidé de dire que tu les aimes à ceux que tu aimes, de dire quand c’est bien, quand c’est beau, quand c’est touchant. D’exprimer tes sentiments. D’essayer d’être gentil et bienveillant contre le cynisme ambiant et ton fond fier et égoïste. Ça change tout. L’amour autour, en donner, en recevoir, ça change tout. Tant pis pour les pisse-froid. »

Date de parution : 24/10/2017

Éditeur : Quidam

Collection : Made In Europe

Nombre de pages : 268

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